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Keti Irubetagoyena, directrice artistique Théâtre Variable n°2 et directrice de la recherche - CNSAD, Paris

les possibles scéniques offerts par l’aliment en termes de travail de l’acteur
{mars 2020}

En septembre 2019, le groupe de recherche et création Théâtre Variable n°2, dirigé par Keti Irubetagoyena, ouvre le cycle de travaux MANGER sur l’alimentation et à ses enjeux dans le rapport de chacun.e à soi et au monde. Ce cycle comprend des objets satellitaires de différentes natures : lectures performées, ateliers d’écriture et de pratique théâtrale avec divers publics, laboratoires de recherches scéniques, plateforme documentaire, publications et communications...

Dans ce cadre, une attention particulière est portée à la question de la nourriture sur les scènes théâtrales, qu’elle soit employée au titre d’aliment (ingurgitée) ou comme simple matériau, possiblement dégradé ou transformé.

Si l’aliment est fréquemment utilisé dans le spectacle vivant (notamment dans le champ de la performance), c’est un outil peu courant de la pédagogie du jeu pour des raisons évidentes de praticité. Pourtant, sa double nature de matière ramenant l’individu humain aussi bien à son animalité qu’à son statut d’être social en fait un puissant adjuvant dans la compréhension des mécanismes qui sous-tendent l’interprétation dramatique.

En scène, l’aliment-accessoire se fait masque. Il contribue au travail de la présence physique des interprètes par la gestuelle que son usage impose. Dans le même temps, il confronte sans commune mesure aux barrières éducationnelles que le jeu théâtral réclame d’apprendre à défaire. Lorsque la gestuelle augmente, l’aliment ouvre les portes de la transgression et de l’outrance, s’offrant à l’exploration d’un large spectre de jeu allant de l’horreur tragique au rire potache et à la farce. Enfin, utilisé non plus dans sa fonction nutritive et sociale mais comme simple matière, l’aliment s’impose comme un important levier de faire sens poétique. Il permet d’explorer la construction d’une dramaturgie de l’image et du son, devenant aliment-partenaire de l’interprète en scène.

Lors du laboratoire de recherches scéniques mené au Studio-Théâtre de Vitry sont explorés les possibles offerts par l’aliment en termes de travail de l’acteur, sous le regard de Marion Chénetier-Alev, enseignante-chercheuse à l'ENS et travaillant sur le jeu de l'acteur.

Ce laboratoire s’inscrit dans la continuité des recherches de doctorat menées par Keti Irubetagoyena sur la présence scénique des interprètes dramatiques, à partir de l’histoire des pédagogies du jeu en Occident au XXème siècle. Il vient compléter le recueil d’exercices tiré de ces recherches : Je ne sais pas quoi te dire... Joue ! (Éditions de l’Entretemps, à paraître). Il dessine également une suite aux projets de recherches théoriques et pratiques sur le jeu de l’acteur auxquels Keti Irubetagoyena a participé ces dernières années : Le jeu du danseur — CEAC, Université de Lille de 2016 à 2018 ; « Rencontre 3 : Jouer, les chemins de l’acteur » — Studio-Théâtre de Vitry en 2018 ; « Opérations de l’acteur » — La Manufacture, Lausanne en 2018.